Sève de bouleau, la récolter ?

Pour de nombreuses personnes qui s’intéressent aux plantes sauvages comestibles ou à la santé au naturel c’est le moment de la récolte de la sève de bouleau. Le printemps est l’occasion de la montée de sève dans les arbres et celle de bouleau est traditionnellement utilisée, on lui attribue diverses vertus, par ailleurs c’est un bon moyen d’avoir accès à une eau filtrée dans un contexte de survie. Mais en plein changement climatique, avec la répétition des phénomènes de sécheresse, est-ce encore viable de priver les arbres de ce précieux liquide ? D’ailleurs sève de bouleau détox ou intox ? Dans cet article des pistes de réflexion sur cette pratique à la mode et quelques conseils pour le faire correctement.

essentielle à la survie de l’arbre

La sève joue un rôle crucial dans la vie et la croissance des arbres. C’est le liquide qui transporte les nutriments essentiels, tels que l’eau et les minéraux, des racines vers les parties aériennes de l’arbre, y compris les feuilles et les bourgeons. Ces nutriments sont nécessaires à la photosynthèse, à la croissance et à la régénération cellulaire de l’arbre. En plus des nutriments et de l’eau, la sève transporte des hormones végétales et d’autres substances chimiques importantes pour la croissance, le développement et la défense de l’arbre contre les maladies et les ravageurs. La sève joue un rôle dans la cicatrisation des plaies et des blessures de l’arbre en formant une sorte de barrière protectrice qui empêche la pénétration de pathogènes ou de parasites. Par dessus tout, la sève est le principal moyen d’hydratation et de rafraîchissement des arbres, ce qui s’avère crucial lors de période de grosses chaleurs ou de sécheresses. Il faut savoir que mal ou trop prélever la sève de bouleau peut créer une discontinuité dans la circulation de la sève et faire rentrer de l’air dans cet énorme circuit. A terme, cela peut causer aux arbres un « choc hydrique », le stress hydrique peut entraîner un flétrissement des feuilles, un ralentissement de la croissance, une chute prématurée des feuilles et, si cela est combiné à une sécheresse trop importante, la mort de l’arbre. Sans compter qu’insectes et champignons profitent de la moindre plaie d’un arbre pour l’infecter.

Des vertus questionnables

La sève de bouleau a été utilisée dans la médecine traditionnelle depuis des siècles dans certaines régions, notamment en Europe du Nord. On lui attribue diverses vertus, pour la détoxification, la revitalisation et le renforcement du système immunitaire. Cependant, en ce qui concerne son efficacité scientifiquement prouvée, les recherches sont encore limitées. Sa composition chimique révèle 95% d’eau. Certains travaux scientifiques suggèrent que la sève de bouleau pourrait avoir des propriétés antioxydantes. Les antioxydants pourraient aider à réduire l’inflammation et à protéger les cellules contre les dommages causés par les radicaux libres, ce qui pourrait avoir des effets bénéfiques pour la santé. Mais il se trouve qu’il existe d’autres substances plus efficaces et étudiées dans le domaine. D’autres études ont examiné les effets de la sève de bouleau sur la santé articulaire, la santé de la peau et d’autres domaines, mais les résultats sont encore variables et souvent limités. Les vertus invoquées ne sont étayées par trop peu de preuves scientifiques : trop peu d’essais cliniques, sur de trop petits échantillons. Par ailleurs elles sont souvent confondues avec les vertus de l’écorce ou de la feuille du bouleau qui, elles, sont inscrites dans la pharmacopée française. Ce qui est certain c’est que c’est à la mode et que c’est un sacré marché ! Le nombre des producteurs ont explosé, on en trouve dans toutes les biocoop, la plupart des magasins bio et même en parapharmacie. En matière de santé on sait à quel point les effets de mode et le marketing sont puissants. La tentation d’y voir un produit de la nature, traditionnel, hautement symbolique et énergétique, voire magique, est grande. ! Attention : allergiques à l’aspirine (et ses dérivés) s’abstenir !

Récolter ou pas ?

Libre à vous de faire vos choix éclairés. Mais la question se pose tout de même : la santé d’un arbre est-elle moins importante pour nous que des prétendues vertus antioxydantes pour notre petite pomme d’humain ? N’avons-nous pas la possibilité de consommer d’autres produits à l’efficience vérifiée pour ça ? Il existe des plantes dépuratives (ail des ours, pissenlit, etc.), pleines de minéraux (ortie, mouron des oiseaux, gaillet gratteron, etc.); et, ce qui est réellement antioxydant réside en fait dans notre hygiène de vie. Il faut aussi savoir que cette pratique est issue d’Europe et d’Amérique du Nord, où les bouleaux ne font clairement pas la même taille que ceux qu’on trouve en France. Est-ce essentiel à notre survie de boire ça ? Je préfère le voir sous cet angle.. .la sève de bouleau est un très bon moyen de se procurer une eau filtrée si on se retrouve perdus dans les bois ou dans le cas d’une pollution extrême de nos milieux par exemple…là ça aurait encore du sens. Si c’est par curiosité que vous le faites sachez que vous serez assez déçus sur le plan gustatif, ce n’est qu’une eau légèrement sucrée. Après si vraiment vous tenez à boire de l’eau sucrée en invoquant la déesse du printemps au moins faites-le bien.

Bonnes pratiques

  • Pour commencer prenez en compte les peuplements de bouleaux de votre région, on ne prélève pas une espèce rare en son milieu.
  • Observez la pluviométrie et les risques de sécheresse de votre région.
  • Privilégiez les bouleaux âgés et vigoureux, dont le tronc a un diamètre d’au moins 30 cm.
  • Non on ne prélève pas des bidons entiers de sève pendant des semaines sur un seul arbre, on en laisse à l’arbre.
  • On ne récolte qu’en début de printemps, avant les premières feuilles, car après cela affaiblirait trop l’arbre.
  • La méthode traditionnelle consiste à percer un petit trou dans le tronc et à insérer un tube ou un robinet pour recueillir la sève qui s’écoule. Il est essentiel de ne pas percer trop profondément pour éviter d’endommager l’arbre. Pour cela on perce légèrement en biais l’écorce (2 cm de profondeur maximum).
  • Pour bien récolter et éviter le gaspillage on vérifie que le récipient est bien fixé à l’arbre à l’aide d’un lien enroulé autour de l’arbre.
  • Il est recommandé de pratiquer une rotation des arbres exploités pour permettre à chaque arbre de se régénérer entre les récoltes. De plus, il est important de ne pas prélever trop de sève d’un arbre en une seule saison pour éviter d’épuiser ses ressources.
  • Une fois la saison de récolte terminée, il est crucial de refermer soigneusement les trous dans les arbres pour prévenir les infections et favoriser la guérison. Des précautions doivent être prises pour éviter toute introduction de maladies ou d’insectes nuisibles lors de la récolte.

Soigner l’arbre après la récolte de la sève de bouleau

  1. Nettoyez la zone autour du trou : Utilisez un chiffon propre ou une brosse pour enlever tout résidu de sève, de poussière ou de débris autour du trou. Assurez-vous que la surface est propre et sèche avant de procéder à la fermeture.
  2. Utilisez un bouchon ou un couvercle spécial : Pour refermer le trou, utilisez un bouchon en liège, que vous pouvez retailler à la bonne taille au couteau. Assurez-vous de choisir un bouchon de la bonne taille pour correspondre au diamètre du trou.
  3. Appliquez de la cire d’abeille ou du mastic à bois : Avant d’insérer le bouchon dans le trou, vous pouvez appliquer une couche de cire d’abeille ou de mastic à bois sur le pourtour du trou. Cela aide à sceller le trou et à empêcher l’eau ou les microbes d’entrer.
  4. Insérez le bouchon dans le trou : Une fois que vous avez préparé le trou, insérez soigneusement le bouchon dans le trou jusqu’à ce qu’il soit bien ajusté. Assurez-vous qu’il est enfoncé suffisamment pour être stable, mais ne forcez pas trop pour éviter d’endommager davantage l’arbre.
  5. Colmatez bien les pourtours de votre réparation à l’aide de cire d’abeille ou de mastic à bois.
  6. Surveillez la cicatrisation : Après avoir refermé le trou, surveillez régulièrement la zone pour vous assurer que la cicatrisation se déroule correctement. Si vous remarquez des signes d’infection ou de dommages supplémentaires, consultez un expert en arboriculture pour obtenir des conseils supplémentaires.

A propos de l’auteure :

Alice Fauconnier  illustratrice nature plantes sauvages comestibles forêt dessinatrice graphiste peintre mural écologie survie en sauvagement

Je m’appelle Alice Fauconnier et suis une dessinatrice et auteure passionnée par la nature. J’ai créé Little Wild Leaves pour ensauvager vos vies ! .

Sources

Peter Wohlleben, la vie secrète des arbres

Impacts of Birch Sap Extraction on Sap Flow and Tree Vitality, revue Forest

https://www.inrae.fr/actualites/limpact-dereglements-climatiques-arbres-vont-manquer-seve

http://gillesw.over-blog.com/2016/02/seve-attrape-nigaud-le-bouleau.html

Ouimet, R., Guillemette, F., Duchesne, L. & Moore, J.-D. Effect of tapping for syrup production on
sugar maple tree growth in the Quebec Appalachians. Trees. 35, 1‑13 (2021).

https://www.lechemindelanature.com/articles/a/recolter-seve-de-bouleau-3

https://www.onf.fr/+/4bd::ces-arbres-forestiers-qui-souffrent-de-la-secheresse.html

https://www.ladepeche.fr/2023/04/07/cest-du-jamais-vu-la-secheresse-impacte-et-trouble-la-seve-de-bouleau-dans-les-hautes-pyrenees-11118684.php

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